De Salin-de-Giraud à Verdun, le destin d’un Arlésien dans la Grande Guerre

Contexte historique

En 1913, le contexte de tensions internationales est exacerbé entre les puissances en Europe, avec les guerres des Balkans (1912-1913) et les soulèvements des peuples de l’empire ottoman qui veulent s’émanciper de la domination turque. En Afrique après la crise de Tanger (1905) les Allemands tentent d’arrêter l’expansion française au Maroc. L’entente entre la France, la Russie et l’Angleterre pousse l’Autriche-Hongrie à augmenter ses effectifs. Des rumeurs circulent et annoncent une augmentation de 120 000 à 850 000 hommes pour l’armée allemande contre 520 000 pour l’armée française.

Sous la présidence de Raymond Poincaré et du gouvernement d’Aristide Briand, le conseil supérieur de la Guerre du 4 mars 1913 porte la durée du service militaire de 2 à 3 ans. C’est « la loi des trois ans » à la demande du Général Joffre chef de l’État Major des armées qui a établi le « plan XVII ». Ce plan préconise, en cas de guerre avec l’Allemagne, une attaque en Alsace Lorraine couvrant la frontière avec la Belgique. Le président de la République par un message au Parlement rappelle «  il n’est possible à un peuple d’être efficacement pacifiste qu’à condition d’être toujours prêt à la guerre ».

Le 28 juin 1914, l’assassinat de l’archiduc autrichien François Ferdinand à Sarajevo provoque la déclaration de guerre de l’Autriche à la Serbie (28 juillet). La Russie soutient la Serbie au nom de la solidarité slave et entre en guerre le 1er août.

Le 31 juillet le socialiste et pacifiste Jean Jaurès est assassiné. Le 3 août 1914, l’Allemagne déclare la guerre à la France, l’Angleterre entre en guerre le 4 août. Le système des alliances aboutit à l’affrontement de La Triple Entente et de la Triple Alliance.

Commence alors une guerre que l’on espère courte et que l’on surnomme la « der des ders ». Les soldats français, à qui on a promis une victoire rapide, partent confiants. Elle mobilisera 73 millions d’hommes, fera 9,5 millions de morts et disparus et 21,2 millions de blessés.

Un Arlésien dans la Grande Guerre

Bien que loin du front, la ville d’Arles participe, comme toutes les autres communes de France, à l’effort de guerre  et subit la pénurie alimentaire. Elle paie également un lourd tribut gravé dans la pierre du monument aux morts ; la construction de celui-ci, décidée par délibération du 22 février 1919, permet de se souvenir des 619 Arlésiens morts pour défendre la patrie.

Louis Joseph B. est un jeune berger né le 13 octobre 1890, à Allos dans les basses Alpes (Alpes de Hautes Provence). Il est le fils de Louis Paul B. et de Marie Virginie Cécile D. Il réside avec son père, veuf, au Grand Badon dans le hameau de Salin-de-Giraud sur la commune d’Arles en Camargue.

Il fait partie de la « classe 1910 » et sera appelé au service militaire le 11 octobre 1911. Il est immédiatement incorporé dans le 2e régiment d’infanterie de montagne de Nice sous le matricule 2197.

Il devient trompette (musique d’ordonnance, signaux d’ordres) le 25 septembre 1912 mais sera « maintenu sous les drapeaux » en vertu de la loi qui prolonge le service militaire jusqu’à trois ans.

Le 2 août il intègre la 3e batterie du 2e régiment de montagne qui se mobilise à Cimiez pour des manœuvres d’entraînement. Le 10 août, elle comprend 4 officiers, 206 hommes de troupe, 19 chevaux et 91 mulets. Le 25 août elle part de la gare du Var pour les Vosges. Là, le régiment opère dans la montagne de l’Ormont, Gérardmer, Saint-Dié, Wattviler jusqu’au 27 novembre 1916. Puis c’est le changement de secteur, le régiment rejoint Chaumont et le ravin du Helly, près du Fort de Douaumont (bataille de Verdun). Lors d’une attaque, le soldat B. sera frappé mortellement par un tir ennemi le 19 décembre 1916, comme le relate le journal de marche de son unité.

Le soldat B. aura pris part à la campagne contre l’Allemagne du 3 août 1914 au 19 décembre 1916. Le journal de marche de son unité précise «  B., blessé mortellement par obus à son poste de combat ».

Le registre de matricule témoigne de sa valeur ; on peut y lire : excellent soldat frappé mortellement le 19 décembre 1916 alors qu’il exerçait un tir de harcèlement ».

On lui attribue ces dernières paroles patriotiques : «  Je suis touché, c’est pour la France ».

Les condoléances du ministre de la Guerre sont transmises à la famille du défunt par l’adjoint spécial de Salin-de-Giraud le 24 janvier 1917.

Il recevra la croix de guerre à titre posthume le 4 novembre 1919. Cette décoration militaire lui est attribuée pour récompenser une citation faite en son honneur le 31 décembre 1916 qui témoigne de son comportement exemplaire.

Il est enterré à la nécropole nationale de Belleray, près de Verdun, dans la tombe 990.

Quelques pistes pédagogiques

Ces documents nous renseignent sur les conditions dans lesquelles les soldats vivent pendant la Grande Guerre et notamment ici le parcours d’un poilu arlésien.

Collège :

Classe de troisième : Thème 1 : La Première Guerre mondiale : vers une guerre totale (1914-1918).

Lycée :

Classe de 1ère : Guerres mondiales et espoirs de paix La Première Guerre mondiale : l’expérience combattante dans une guerre totale.

Document 1 : Lettre avis de décès du bureau spécial de comptabilité du 2ème régiment de montagne de Nice adressée au maire d’Arles.

Où résidait-il avec ses parents ?

Quel est le nom du corps d’armée auquel il appartient ?

Quelle est la fonction de ce soldat ?

Où est-il mort ? Durant quelle bataille ?

Document 2 : Verso de l’acte de décès militaire du 6 août 1920.

Quelle récompense reçoit-il et pourquoi ? Donnez en une définition.

Sébastien Brunet Professeur au service éducatif des Archives Communales de la ville d’Arles