Une infirmière dans la Grande Guerre

La participation des femmes à l’effort de guerre est un aspect important de la Grande Guerre. Les hommes étant mobilisés au front, elles furent obligées d’assumer avec courage des travaux qui, jusqu’alors, étaient réservés au sexe fort. Ce fut le cas dans les champs ou en usines avec les munitionnettes qui fabriquaient des obus ; elles assumèrent également les soins des soldats en tant qu’infirmières.

Geneviève Hennet de Goutel était de ces femmes dont le destin bascula pendant la Première Guerre Mondiale. Issue d’une famille très catholique qui trouve ses origines maternelles à Arles, elle naît à Paris le 11 avril 1885 d’Alfred Hennet de Goutel et d’Annie Balze.

Son grand-père maternel était, en effet,  Raymond Balze, frère de Paul, tous deux célèbres peintres arlésiens qui entrèrent à l’école des Beaux Arts à Paris, respectivement en 1831 et 1832. Ils furent élèves d’Ingres et peignirent à Rome. Raymond fût d’ailleurs nommé inspecteur de l’école de dessin de la ville de Paris par le président Thiers en 1871.

Aujourd’hui encore, certaines de leurs œuvres sont conservées à Arles dont la plus célèbre est la peinture de la fontaine Amédée Pichot.

Geneviève Hennet de Goutel, héritant du talent artistique de son grand père et de sa mère, exerce ses dons en créant des affiches pour le PLM. Elle écrit des pièces de théâtre sur le thème de Noël « La nuit de cristal », des pièces pour enfants en adaptant « Malbrough s’en va en guerre », dont le bénéfice permit aux enfants nécessiteux d’aller en colonie de vacances à la montagne.

Très impliquée dans la paroisse de Saint Germain-des-Près, elle rejoint le mouvement catholique « le sillon », fondé par Marc Sangnier.

Quand la guerre éclate, en 1914, elle décide de devenir infirmière, elle a 29 ans. Elle entre pour préparer son brevet à l’hôpital école privé « les peupliers » du 13e arrondissement de Paris ; cet établissement de la Société de Secours aux Blessés Militaires, qui est une branche de la Croix Rouge, est créé en 1908. Son altruisme prend là tout son sens.

Elle continue d’écrire pour remonter le moral des enfants malades et signe une pastorale « Au pays des cigales », qui sera d’ailleurs saluée par Frédéric Mistral.

En février 1915, elle rejoint l’hôpital auxiliaire N°5 de Nevers dont elle deviendra la directrice en septembre 1916.

Le 27 août 1916, la Roumanie déclare la guerre à l’Autriche-Hongrie. La Société de Secours des Blessés Militaires demande à Geneviève de rejoindre la mission médicale française, dirigée par le Général Berthelot et qui compte une quinzaine de personnes. Elle part le 4 octobre 1916, honorant ainsi la promesse faite à la marquise de Belloy, une très proche amie d’origine roumaine, épouse de l’attaché naval de Bucarest.

Cette première mission médicale française accomplit un véritable périple à travers l’Europe, depuis Paris, en passant par Londres, Newcastle, la Norvège, la Finlande, la Russie pour arriver enfin à Bucarest le 22 octobre où elle est accueillie par une délégation officielle.

Elle s’installe à l’hôpital moderne de Bucarest qui accueille 200 blessés. Le nombre d’infirmières étant insuffisant, des Roumaines sont appelées en renfort. D’ailleurs 80 d’entre elles seront formées par Geneviève. Celle-ci écrit un manuel à l’intention des futures infirmières qui sera paraphé par la Reine Maria Régina elle même. Les Allemands menaçant Bucarest, l’ambassadeur de France en Roumanie ordonne de déplacer la mission à Jassy (Iasi) en Moldavie (actuellement en Roumanie).

Là, un hôpital de fortune pour les contagieux sera construit dans une immense maison isolée dans la forêt. Le manque d’hygiène provoque la prolifération des poux qui propagent le typhus. Le 12 décembre, les premiers malades arrivent. Geneviève ne ménage pas ses efforts pour leur venir en aide et contracte ainsi la maladie. Elle meurt après avoir lutté un mois, le 4 mars 1917. La Reine Regina Maria de Roumanie est venue souvent lui rendre visite.

Sur rapport du ministre de la Guerre, le roi Ferdinand Ier ordonne, le 22 février, de lui décerner la médaille Regina Maria.

Le 12 mars, son cercueil de plomb enveloppé par le drapeau tricolore où sont épinglées ses médailles : la Regina Maria et la croix de guerre, est salué par une foule venue lui rendre un dernier hommage à Jassy .

Le destin remarquable de Geneviève sera mentionné par la reine Regina Maria de Roumanie dans un article du Figaro du 4 septembre 1917 «[…]les opérations autour de Bucarest. Et puis, ce sont les médecins: Clunet,Crèche, Santoni, Germain qui tombèrent en héros en luttant contre l’inexorable contagion, ainsi que ces admirables infirmières, Mlles de Goutel et Flipp, et les deux sœurs de Saint-Vincent- de-Paul, Sœur Angèle et Sœur Antoinette. ».

Elle reçut la médaille d’honneur des épidémies en vermeil : J.O. 17 mars 1917 :

Elle sera citée dans le Livre des morts pour la France (ci-dessous).

Son nom sera donné au regroupement des infirmières de l’Union Catholique des Infirmières et des Travailleuses Sociales, fondée par Marie d’Airoles, devenue internationale en 1933.

La promotion 1940-1942 de l’institut de formation et Écoles d’infirmières du CHU de Rennes, qui comptera 49 élèves, portera également son nom.

Elle est enterrée dans la 10e division du cimetière Montparnasse.

Quelle est la place dans le programme d’Histoire ?

Collège :

Classe de troisième : Thème 1 : La Première Guerre mondiale : vers une guerre totale (1914-1918).

Lycée :

classe de première

Thème : La guerre au XX°siècle : La Première Guerre mondiale

Contexte Historique 

Durant la première guerre mondiale les femmes doivent prendre des responsabilités jusque là réservées aux hommes. Elles participent pleinement à l’effort de guerre comme les munitionnettes ou encore les infirmières. Le destin exceptionnel de Geneviève Hennet de Goutel montre que certaines d’entre elles s’illustrent particulièrement. Elle n’aurait jamais imaginé vivre cette aventure qui s’avéra tragique pour elle.

Son parcours permet également de montrer la coopération entre alliés ( France Roumanie), le rôle humanitaire des organisations comme la Croix Rouge Française et les missions des équipes médicale qui prennent en charge des blessés de guerre et des malades.

Quelques consignes :

1. Quelle est la place des femmes dans la grande guerre ?
2. Qu’est-ce que de la Croix rouge ? Et quel est son rôle ?
3. Montrer comment les missions médicales françaises s’investissent à l’étranger .
4. Pourquoi en Roumanie en particulier ?

Document 1, 2 et 3 :

1. Quelles récompenses reçoit G. Hennet de Goutel par le souverain de Roumanie et l’État français ? Donner leur définition.
2. D’après le tableau d’honneur des morts pour la France, quelles qualités sont mises en évidence dans la citation ?
3. Pourquoi le destin de Geneviève Hennet de Goutel est-il exceptionnel ?

Sébastien Brunet Professeur relais au service éducatif des Archives Communales de la ville d’Arles