Culture / Patrimoine, Personnalités

Quand Arles recevait Maryse Condé

La grande dame des lettres d'origine guadeloupéenne, Maryse Condé, est morte à l'âge de 90 ans dans la nuit du 1er au 2 avril 2024. Elle avait fait l'une de ses dernières apparitions publiques à Arles, en 2020.

Publié par Marie-Pierre Garrabos le


C’était une femme forte, une de ces femmes qui se tracent un destin et qui l’assument, malgré les obstacles, les préjugés de classe et de race“. C’est ainsi que l’auteure arlésienne Annie Maïllis rend hommage, ce mardi 2 avril 2024 à Maryse Condé, l’écrivaine disparue dans la nuit de lundi à mardi. Annie Maïllis était à l’origine de l’une des dernières apparitions publiques de la femme de lettres : c’était le 8 mars 2020, lors du festival Arles se livre. “Elle avait reçu en 2018 le prix Nobel alternatif de littérature pour son roman “Le fabuleux et triste destin d’Ivan et Ivana” et je trouvais juste qu’un festival consacré à la lecture et aux livres lui rende hommage,” raconte Annie Maïllis. “Elle en avait été très touchée.” La manifestation avait réuni de nombreux Arlésiens mais aussi des admiratrices venues spécialement du continent africain. A travers la lecture d’extraits de ses oeuvres, les intervenants soulignaient combien l’oeuvre et le parcours de Maryse Condé étaient inspirants.

La condition de la femme caribéenne, l’esclavage, les relations complexes entre l’Afrique et sa diaspora sont quelques-uns des thèmes que Maryse Condé, née en Guadeloupe en 1934, explorait. Celle qui avait commencé sa carrière d’enseignante et d’écrivaine en Afrique, où elle avait suivi son premier mari d’abord en Côte d’Ivoire puis en Guinée, avait ensuite enseigné pendant une trentaine d’années à l’université Columbia, à New-York, où elle avait contribué à faire connaître la littérature francophone aux Américains. En 2020, le président de la République remettait à cette grande dame des lettres la grand-croix de l’ordre national du Mérite, en soulignant qu’elle faisait partie ” des écrivains qui m’ont appris l’Afrique“.

Annie Maïllis, que l’on voit ici à Arles avec Maryse Condé et son mari Richard Philcox, en dresse un portrait plus intime : “dans la vie comme dans son oeuvre, elle a toujours refusé de se laisser enfermer dans un genre : elle a écrit des romans, des nouvelles, des essais, des contes. Elle m’évoque Colette : comme elle, elle a mené sa carrière professionnelle et littéraire tout en vivant pleinement sa vie de femme. Ecrivaine de la sensualité, elle était aussi une cuisinière accomplie.

Très affaiblie par la maladie neuro-dégénérative héréditaire qui l’a frappé, devenue aveugle, Maryse Condé avait dicté ses deux derniers romans et travaillait à un autre lors de son décès. “Tout en continuant à suivre l’actualité, en s’intéressant à la marche du monde, sans se départir d’une vraie gentillesse et d’un humour piquant.”

La médiathèque d’Arles propose de nombreux ouvrages de Maryse Condé, dont Segou, l’épopée romanesque en 2 volumes qui l’a fait connaître dans le monde entier, et La vie sans fards, son autobiographie. mediatheque.ville-arles.fr